ARTAUD / Les recoins de la perte

Je mets le doigt sur le point précis de la faille, du glissement inavoué. Car l’esprit est plus reptilien que vous-même, Messieurs, il se dérobe comme les serpents, il se dérobe jusqu’à attenter à nos langues, je veux dire à les laisser en suspens.

Je suis celui qui a le mieux senti le désarroi stupéfiant de sa langue dans ses relations avec la pensée. Je suis celui qui a le mieux repéré la minute de ses plus intimes, de ses plus insoupçonnables glissements. Je me perds dans ma pensée en vérité comme on rêve, comme on rentre subitement dans sa pensée. Je suis celui qui connaît les recoins de la perte.

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