Comment les mots bâtissent la Réalité
Ce texte est dédié à la présence subliminale d’Alexia Desfourneaux.
L’ Amour n’est pas soumis aux rayons feu-follet ni aux flammes violettes qui détachent le bien d’un mystérieux trésor. Je n’ai rien à ajouter. Toi oui.
Fin du fond les choses qui ne sont pas faciles à dire. Le reste c’est pour le détecteur de mensonge.
L’ Amour est un climax étendu sur le reflet d’un couteau halluciné par un étranger qui va tirer quatre fois sur un gisant à terre qui aura perdu de sa superbe au gré des douilles.
L’ Amour est une réunion de droites sécantes et indécentes qui n’auraient jamais du se rencontrer
Dans un espace-vide qui ne s’attend pas à ça
Pourtant profilé pour ça
Trop androgyne pour être vrai
Avec ce sourire habité par la chaîne que des pieds au cortex nous nous escrimons à faire mouvoir
Un corbillard et 4 clous de nombreuses béatitudes même s’il n’y aura plus de sermons sur nos montagnes
Les béatitudes resteront traduites dans toutes les langues au même titre que l’injustice
L’ Amour est celui qui donne de l’eau oxygénée quand on faim
Et une éponge humectée de vinaigre quand on a soif
Un geste familier
Ta main sur ma joue ma blessure incomprise comptine lentement qui se formule et se dessine
Apprenez-moi comment réunir l’affection et tous les quadrilatères de la raison de toutes les latitudes.
Il n’y aura jamais eu qu’une seule option pour changer la vie
À tout le moins pour éviter la multiplication du rien.
©Guillaume HOOGVELD #2020 pour le texte
©Henri MICHAUX pour la peinture. Droits réservés.
Illustration originale
Armen SAAKYAN, acrylique, #Nus, #2012©
Où est-elle La Rencontre avec un grand R comme Rage de dent ? Rage du petit matin Rage du soiR…
Le R qui clôture aussi le mot espoiR ?
Pourquoi son rythme
Parcouru de cale en soute des fers a la trépointe de fond en comble est-il si lent à la longue…
Où sont les flammes violettes que nous ramassions après le semi de l’automne
Avant les bombes à fragmentation
Pourquoi est-ce les plus grands esprits qui tombent
Il n’y aucun champ d’honneur
La guerre est une simili aventure qui nous sépare et nous déchire
Dans l’armoire du salon personne à la ronde
Sur les boulevards de la terre personne à la ronde
Sous les bunkers personne à la ronde
À Miami du monde mais personne à la ronde
En huit allez neuf millisecondes un barillet chargé
9 mm ton Beretta comme livre de chevet
Tout semble affairé mais captif
Poète rue de Rivoli
Au métro aérien de la Motte-Picquet-Grenelle
Près du Pont de Bir-Hakeim
Je n’ai pas osé lui dire je t’aime
On a traversé ensemble la Seine
Un simple aller aurait suffit
Un simple murmure ou rictus aurait rectifié l’air du temps
Cette fille déjà femme
Qui n’était prête à rien
Qui ne filtrait que le mode mineur
Sans avoir signé de ma main mon désir
Je n’allais pas lui offrir des fleurs
Un tatouage près du corps que j’aurais pu toucher
Un sens à sa vie que la vague atone lui intimait d’oublier
Silhouette tu ne sais rien de tes courbes
Fixée par vidéosurveillance
Tu te déplaces comme on déplace un simple espace
Je suis seul à rêver la capture de ta chevelure
En dessous des feux de ma mémoire
Ou de tous les chroniqueurs de prétoires
La Rencontre n’aura pas eu lieu
J’ai la larme légère et facile
Il bruinait marteaux et faucilles
Sous une rage de désir à transformer les quais
Sur le clocher de ma montre
Abasourdie la trotteuse
fixait mon chagrin lacrymogène
Comme cette passante dans ma vie
Qui sans le savoir s’est fait la belle
Un bal de nuit offert comme par merveille
Mon jour qui aura perdu son sel.
©Guillaume HOOGVELD #2019 pour le texte
Je n’irai plus rêver au fond des palais
Et pourtant larmes à l’oeil
Il suffira d’une ignition d’une itération
Parcelle d’étincelle
J’ai compris que rien n’aura lieu
Encore sous la disparition des points
Par le soleil
Sous la disparition des points
Alors que rien ne veille
Je ne vois rien au delà au devant de moi
Je n’ai plus que mes mots à proposer aux autres
C’est déjà tout un Monde.
Zénith
C’était si bien le jardin aux yeux verts
Les portes ouvertes de la beauté
Le tremblement de la main de l’amour
Et l’espoir d’arriver à temps pour l’orage
C’était si bien le chemin dessiné
Avec le doigt sur la paume
Les lignes de vie, le signe du sourire
La profondeur de l’aiguille aimantée
C’était si bien dans le soleil un accident
D’oiseaux, le bruit aérien de la laine
Les tissus froissés, les ventres dénudés
Les plumes du génie de ta voix
C’était si bien la grandeur de la nuit
L’écriture rapide de nos spasmes
La prosodie du plaisir, fléchissant,
Remontant, le feu, le feu, le feu
C’était si bien nos enfants courant sur le lit
Le bruit de la clé dans la porte
Et le visage qui se relève et le choc
Sans fin du retour de l’éternité.
(30 août)
Contre-poison
Je suis avec toi dans le temps
Enroulés dans nos couvertures
Tu dors loin de moi et j’attends
Les longs doigts de la ville endormie
Redessinent tes yeux fermés
Je suis dans la cité du rêve
La montre bleue et l’écran noir
Le téléphone absent, le café dans la tasse
Les heures claires de la nuit
Plein de choses me manquent mais toi
Tu ne manques pas, tu me troues
Je sens le fruit de la douleur
S’ouvrir en deux entre tes paumes
Le suc délicieux et vivant
Coule sur ton poignet de velours
Petite vasque où je bois à genoux
Tu es glacée et ta lente salive
Pénètre les réseaux et les cordes
De mon corps nu, vibrant
Tous les bonheurs de la lumière sont venus
Par le philtre de ton regard
Ton rire vit en moi
Ta peau peinte avec le pinceau
Du matin – est ma lampe.
Faire-part
Ta main lisse posée sur le ventre
Ta douceur transformée en griffes
Tu montes en arrière dans la langue
Tu tournes la tête et tu chantes
Ta beauté de monstre savant éclate
Le feu crépite dans mes veines.
Je meurs
Je vois tes yeux de soufre et de salpêtre
Le jeu du tourbillon qui troue le plafond
Le ciel devient panique
L’été brûle les dernières fleurs
Je suis entré dans la douleur
J’attends la fin du jour, l’œil crevé
Le cyclope de la tempête
J’attends le vin et la froideur
L’amour a plus d’un tour
Pour nous briser le cœur
Je n’ai jamais été joueur
Je suis entré dans la douleur
Je dessine dans l’air ton visage
J’entends le chant de ta voix,
Le bonheur que tu m’as donné
Que tu m’as repris
Et qui reviendra un jour
Sans moi.
22 juillet
Tu es là
Tu es là, avec les yeux tournés vers la lumière
Je vois ta nuque, tes épaules rondes et nacrées
Et je vois le reflet de ton regard dans la trouée
Des nuages et dans le masque du soleil.
Je tire à moi l’espace en respirant entre mes poings
Je tourne dans un grand vent de papier qui se lève
Je gagne les régions mathématiques du rêve
Je dors debout en jouissant entre tes reins
Je parle dans la nuit sans prononcer un mot
Personne ne se doute des mots de mon silence
Je déconnecte tous les appareils de voyance
Je suis mort n’importe où et je vis dans tes bras
La signature de ton sang sur le bleu des draps
Où la main de l’artiste infléchit les jambages
Révèle la blancheur de la première page
Tu écris en saignant le roman de ta voix.
LUC DELLISSE 2011 ©
Luc Dellisse, écrivain et poète. Il enseigne à la Sorbonne et à l’Université de Bruxelles, a déjà publié aux Impressions nouvelles trois romans : Le Jugement dernier, Le Testament belge et Le Professeur de scénario,
La poésie est son cheval de Troie : grâce à elle, il pénètre sur des planètes inconnues. Mais c’est un rythme lent, souterrain. Les poèmes présentés ici sont issus de « Ciel ouvert« son prochain recueil, à paraître en 2012, qui rassemble des créations depuis 2005.
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