La Porte étroite

« Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite. » Luc, XIII, 24

Ne jamais blesser et violenter quiconque de biologique, voilà je crois toute la morale de l’Homme numérique. La porte étroite parfaite, c’est le casse du siècle sans verre pilé, hémoglobine et violence. C’est jouer en gentleman, très serré, sans une touche d’ADN ou un filet d’échantillons numériques révélateurs ou GPS délateurs.

Celui qui n’apporte pas la bonne nouvelle il va devoir vite entrer par la porte étroite…

Le crime parfait sera bientôt aboli, avec les conséquences insensées et irréfléchies de ses adorateurs et laudateurs sans raide révolte si ce n’est que des punks à chiens dressés en lumpenprolétaires étudiants à la barbiche.

Tout caryotype sera suspect.

Toute la société de consumation avec son bazar de quincaillerie et son contrôle social est une perpétuelle manière sans école de nous pousser à la transgression et j’ai vu les esprits les plus brillants de ma génération s’y perdre, perdus par et pour la performance . Quid du casse parfait, sans victime, en tailleur anglais de dandy, froidement exécuté par un soupçon d’éther ou de chloroforme lentement diffusé, sans heurter les bonnes manières les savants protocoles. Autant dire que la cabane n’est pas le meilleur centre de formation, ni les spots au ciels bleus retouchés numériquement.

La vraie violence , la plus perfide, est numérique, glaciale, d’ordre transactionnelle comme une lettre de licenciement sécurisée par cryptage reçue par mail. La caresse était analogique, le numérique nous apporte tout mais nous payons cette pléthore de biens par la frustration et la retenue, la frustration de cette contention affolante. Quant au sexe, il ne sera plus qu’une contingence, guère une possibilité discriminante ou tentation des vacuums, pour la première fois de l’Histoire des Hommes.
Avec les insomnies et cette furieuse lucidité qui tombe comme un couperet et comme « l’éternel retour du concret » d’ Hegel disparaissent violemment la perfusion des agréments dont la santé du jour nous permet de supporter la pesanteur.

Par subordination du réel, je vous précède en éclaireur, j’ouvre les brèches ; pardonnez du peu. L’ Azur n’a pas tenu promesse, il m’a défiguré.

Je m’appelle William Jonas Ashtray aka Bill Ashtray

et je suis venu vous dire toute la vérité rien que la vérité. Je m’appelle ainsi mais je n’ai rien à voir avec ce qu’il dit ce qu’il fait à quoi il joue pour qui il travaille, mis à part ses performances papier sur Poètes Anonymes Associés et vous le savez.

©Bill ASHTRAY @2018 pour le texte

©Jean-Marc MUSIAL, Série René Daumal ©Un dessin une nuit pour l’image